Bulletin TP Express - Mai 2016

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Josiane Roulez, journaliste

Des drones au service de l’agriculture et de l’inspection de bâtiments

De plus en plus accessibles et sophistiqués, les drones ouvrent de nouvelles possibilités pour inspecter des champs agricoles et des bâtiments. Deux technologues partagent leur expérience.

Inspection de champs
Lorsqu’il s’est lancé dans la production de pommes de terre de transformation, il y a 3 ans, Pierre-Luc Barré a eu une mauvaise surprise : une grande partie de ses semis n’ont pas levé. De son tracteur, il n’arrivait pas à mesurer l’ampleur des dégâts. Il a alors eu l’idée de faire appel à un collègue de son père, qui possédait un drone, pour examiner son champ.


« Les photos aériennes révélaient environ 40 % de pertes. Nous avons pu les relier à l’une des deux variétés de semences que nous avions reçues. Nous avons montré les photos à notre fournisseur, qui nous a dédommagés », explique le technologue en agriculture, copropriétaire avec son père de la Ferme Yves Barré et de l’entreprise Barré Labonté, à Saint-Damase, spécialisées dans la production et le transport des légumes de transformation.

Impressionné, Pierre-Luc Barré a fait l’acquisition d’un drone récréatif, et inspecte désormais ses champs plusieurs fois par année.  « Le drone m’offre une vue d’ensemble et m’aide à repérer les problèmes, particulièrement en matière de drainage et de nivellement. J’ai aussi pu détecter et corriger un problème de compaction du sol qui nuisait à mes cultures, et sauver la moitié d’un champ de haricots touché par une bactérie », affirme-t-il.

Deux bémols : le règlement pour les drones récréatifs interdit de les faire voler à plus de 90 mètres, alors qu’une hauteur supérieure offrirait une meilleure vue d’ensemble. De plus, l’inspection par drone doit se faire lors de journées ensoleillées et sans vent. Ces inconvénients ne pèsent toutefois pas bien lourd dans la balance en regard de l’augmentation de rendement obtenue.

Inspection de bâtiments : façades et thermographie
Patrick Masson, technologue professionnel en architecture et directeur des expertises chez Patenaude Trempe Van Dalen, teste deux avenues d’utilisation des drones : l’inspection de façades de bâtiments et la thermographie infrarouge.

« Nous avons fait un essai en août 2015 en collaboration avec la firme Elipto pour inspecter la façade d’un immeuble de neuf étages au centre-ville de Montréal, et le résultat était très concluant », déclare-t-il. Les drones peuvent en effet photographier en contre-plongée certains éléments architecturaux, comme des corniches ou des encorbellements. Ces zones demeurent habituellement invisibles par la méthode d’inspection traditionnelle, qui consiste à photographier l’extérieur du bâtiment depuis la rue avec une lunette d’approche.

Même si elle peut être dispendieuse, l’inspection par drone présente donc des avantages importants pour l’inspection de façades complexes. De plus, comme elle génère beaucoup de données, elle permet un suivi dans le temps par comparaison du résultat de deux inspections à quelques années d’intervalle.

Lorsqu’ils sont utilisés pour la thermographie infrarouge, les drones font baisser les coûts. Cette technologie de plus en plus populaire permet de détecter, par exemple, des problèmes d’isolation, d’étanchéité, d’infiltration d’eau, de condensation ou de fuites d’air, autant dans les murs que dans les toitures.

« Nous venons de compléter, en mars dernier, l’inspection du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), un bâtiment de 21 étages. Nous n’aurions pu faire ce travail à partir du sol. L’angle de la caméra aurait été trop prononcé, et cela aurait faussé les données. Un drone, par contre, maintient une position perpendiculaire à la façade et se déplace très vite. Cela facilite et accélère énormément le processus d’inspection. Autrement, nous devrions utiliser une grue », explique Patrick Masson. Les drones sont aussi très pratiques pour inspecter la toiture de grands bâtiments, offrant rapidement une vue d’ensemble.

Les règles de l’art
Mais attention, on ne devient pas « inspecteur par drone » en claquant des doigts ! Seul un pilote de drone certifié par Transport Canada peut réaliser ce type d’inspection. L’entreprise responsable doit louer le trottoir, fermer un périmètre de sécurité, dévier la circulation et retenir les services de signaleurs au besoin. Et impossible de voler par grand vent, ce qui pose problèmes dans certaines zones très venteuses.

Malgré tout, les technologies reliées aux drones se développent à une vitesse vertigineuse, et offriront aux technologues de plus en plus de possibilités. Un secteur à surveiller de très près !