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BULLETIN TP EXPRESS - NOVEMBRE 2009


L'APICULTURE
LES ABEILLES INDISPENSABLES ET MENACÉS

par Gaétan Tremblay, journaliste

Univers peu connu et combien intéressant, le monde des abeilles est menacé par une dangereuse maladie qui inquiète les apiculteurs du globe entier. Au Québec, la menace semble contenue. Heureusement, car cet insecte est essentiel en production maraîchère et de petits fruits.

Le Québec compte 120 apiculteurs dont le tiers est installé en Estrie. Une ruche en santé produit 120 livres de miel. La production totale québécoise de miel rapporte annuellement sept millions de dollars.

Jean-François Régalbuto et Catherine Kirouac — deux technologues en protection de l’environnement de formation — sont propriétaires de Rustique apiculture à Saint-Camille en Estrie. En affaires depuis 2003, Rustique apiculture possède 500 ruches. Ses deux propriétaires vivent de la vente de miel et de la production d’abeilles-reine.

Le varroa destructor
La production du miel connaît de grandes difficultés depuis quelques années. « Au Québec, les pertes d’abeilles se sont élevées à 60 % en 2004 et à 35 % l’an dernier contre les 5 % à 10 % pour une année normale, commente Jean-François Régalbuto. Malgré tout, nos entreprises s’en tirent mieux qu’ailleurs, et on apprend peu à peu à vivre avec les contraintes. La nature y pourvoit en partie puisque les ruches se reconstituent très rapidement par essaimage. En un an, une ruche saine donne un nuclei, c’est-à-dire un nouvel essaim pouvant produire dès l’année suivante. »
Il n’empêche qu’ailleurs, les spécialistes du monde entier s’interrogent sur les causes de l’hécatombe d’abeilles. On entend beaucoup parler de Colony Collapse Disorders (CCD), mais, selon l’apiculteur québécois, c’est une appellation bien commode pour désigner plusieurs causes mal identifiées. En fait, par exemple aux États-Unis, on peut douter des pratiques. « D’abord, on utilise beaucoup de pesticides dans les ruches, explique Jean-François Régalbuto. Ensuite, on augmente le stress que subissent les abeilles en transportant parfois les ruches sur des milliers de kilomètres pour polliniser, par exemple, des vergers en Floride. » Au Québec, on aurait plutôt choisi de s’attaquer spécifiquement au varroa destructor, le fléau qui fait rage depuis quelques années. Ce parasite acarien perce le dos de l’abeille pour se nourrir de sa lymphe. Ici, comme en Europe, on évite les pesticides pour favoriser l’emploi des acides formique et oxalique qui ne laissent pas de résidu dans les ruches. La méthode semble gagnante.

Une lutte efficace suppose des connaissances appropriées. Jean-François Régalbuto déplore le manque de formation destiné aux apiculteurs. « J’ai reçu une formation d’agronome, mais j’ai peu appris à l’université, avoue-t-il. Pour apprendre son métier, l’apiculteur québécois doit assister à des colloques et rencontrer les chercheurs. Toutefois, depuis peu, le cégep d’Alma offre une Attestation d’études collégiales qui semble satisfaire les attentes des étudiants. »

Les abeilles-reine
Rustique apiculture est une des trois entreprises québécoises à élever des abeilles-reine pour la reproduction. Chaque année, l’apiculteur de Saint-Camille vend 5 000 de ces abeilles-reine pour la reproduction et 3 000 cellules royales. Dans le premier cas, le producteur s’assure de leur fécondité dans ses propres ruches de développement; dans le second, c’est l’acheteur qui prend le risque du processus de reproduction à partir de la larve. C’est la méthode de propagation génétique la moins rapide. Ce marché fait l’objet d’un intense commerce au Canada alors que le territoire étasunien est inaccessible; il est d’ailleurs trop vaste pour les petits producteurs québécois auxquels on exige des certificats sanitaires. « En fait, explique Jean-François Régalbuto, la barrière est premièrement naturelle. C’est l’écotypage, c’est-à-dire l’adaptation de l’abeille à son environnement. Il y a quelques années, les apiculteurs québécois ont importé un grand nombre d’insectes d’Australie, mais leur rendement s’est avéré insatisfaisant. »

La pollinisation
L’autre grand débouché de l’apiculture, c’est la pollinisation. Cette activité constitue la moitié des revenus des apiculteurs. Plusieurs productions agroalimentaires dépendent de la pollinisation : pommes, concombres, framboises et, tout particulièrement, les bleuets et les canneberges. En fait, quarante pour cent des aliments qui apparaissent sur nos tables nécessitent le concours des abeilles. Chaque année, 25 000 ruches prennent la route du Lac-Saint-Jean, au coût d’environ 125 $ par ruche, pour la pollinisation des bleuetières. La pollinisation améliore beaucoup les rendements. Chaque plant de bleuets possède huit fleurs. Sans pollinisation, on obtient un ou deux fruits. Grâce aux abeilles butineuses, le plant en donne huit. De plus, les fruits, bleuets, pommes, etc., sont plus gros et plus beaux. Une large partie de la flore dépend de la pollinisation. Les arbres feuillus, érable, noisetier, tilleul, etc. en ont besoin pour se reproduire.

Les prédateurs
Outre les maladies, plusieurs prédateurs s’attaquent aux abeilles. Ce sont les oiseaux — mésanges, tyrans, etc. —, qui gobent les abeilles en plein vol, et la mouffette et le raton-laveur qui endommagent les ruchers. L’ours est le plus destructeur de ces prédateurs. De plus en plus présent partout au Québec, il peut dévaster totalement une ruche pour se gaver de larves et d’abeilles, une source abondante de protéines.

Autres usages
La tradition prête au miel diverses vertus. La médecine moderne lui reconnaît des propriétés bénéfiques. Le miel et la gelée royale possèdent des qualités thérapeutiques. La cire certifiée sans pesticide permet de fabriquer un onguent antibactérien pour les grands brûlés qui dépassent en efficacité les crèmes antibiotiques. En Europe, le venin est utilisé pour lutter contre certaines maladies comme l’arthrite, le rhumatisme et le traitement des bursites.


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