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BULLETIN TP EXPRESS - Août 2013



Catastrophe ferroviaire à Lac-Mégantic :
Trois TP au cœur du drame

Stéphane Gagné

Le 6 juillet 2013 restera à jamais une date gravée dans la mémoire de tous les Québécois. Très tôt dans la nuit de cette journée, en plein centre-ville de Lac-Mégantic, survenait la pire catastrophe environnementale que le Québec ait connue : un gigantesque incendie causé par un déraillement de train contenant des wagons remplis de pétrole brut. Le Bulletin T.P. Express a pu parler à trois des quatre technologues, membres de l’Ordre, qui résident ou travaillent dans la municipalité éprouvée. Compte-rendu.

Un TP mobilisé dès les premiers instants

Robert Mercier, T.P., directeur du service de l’environnement de la municipalité (devenu coordonnateur des mesures d’urgence depuis le 6 juillet), était au cœur de l’action lorsque l’incendie s’est déclaré. D’abord, parce qu’il réside à 400 pieds du lieu de l’explosion et ensuite en raison de ses fonctions névralgiques. « Je me suis d’abord éloigné du lieu du sinistre avec ma famille, mais très vite, je me suis mobilisé, dit-il affirmant n’avoir dormi qu’une heure au cours des 60 premières heures qui ont suivi l’explosion. En premier lieu, il fallait fournir de l’eau en quantité suffisante pour permettre aux pompiers de faire leur travail. Mais comme il n’y avait plus d’électricité (les lignes électriques et liens de communication ayant brûlé), nous avons dû faire fonctionner l’usine de filtration manuellement jusqu’au retour du courant. »

M. Mercier et son équipe allaient toutefois faire face à d’autres problèmes. « L’approvisionnement en eau était menacé par des fuites d’eau provenant des entrées d’eau éclatées des 41 bâtiments qui se sont affaissés dans la zone sinistrée, dit M. Mercier. À cela, il fallait ajouter une borne-fontaine murale qui laissait fuir une quantité importante d’eau. Alors que l’incendie n’était pas encore complètement éteint, il a fallu fermer une à une ces entrées d’eau. »

Malgré ses interventions, la Ville a manqué d’eau dans la nuit du 7 juillet. « Bien que nous nous sommes assurés que la polyvalente (lieu d’hébergement des sinistrés) et l’hôpital ne manquent jamais d’eau, la quantité d’eau est devenue insuffisante, relate-t-il. Nous avons alors établi un pont routier de transport d’eau entre Sherbrooke et Lac-Mégantic jusqu’au retour à la normale. Nous avons ensuite restauré notre réseau secteur par secteur. » Seulement cinq jours après le drame, tous les résidants avaient de l’eau à nouveau.

L’eau potable n’est qu’un des problèmes survenus. Très vite, M. Mercier et son équipe ont aussi dû s’occuper du traitement des eaux usées. « De grandes quantités de pétrole se sont retrouvées dans les bassins de notre usine, transportées par le réseau d’eaux usées domestiques, » dit le directeur de l’environnement. En accord avec Urgence Environnement, l’usine qui ne pouvait traiter cette pollution a été placée en dérivation afin de protéger la rivière. L’entreprise Sanexen a été mandatée pour installer rapidement une unité de traitement portative des eaux et des boues contaminées par le pétrole. Cette unité restera en opération le temps nécessaire pour traiter les eaux contaminées par le pétrole. 

Entretemps, il fallait sans tarder remettre en opération l’usine de type boues activées, de la municipalité. C’est que cette boue avait été contaminée par le pétrole et ne pouvait plus contribuer à épurer les eaux usées. « Nous avons donc fait venir quatre camions de 32 mètres cubes chargés de boues en provenance de l’usine de Victoriaville (une usine du même type que celle de Mégantic), dit M. Mercier. Cela a permis de remettre rapidement en fonction le traitement biologique. » La restauration complète de l’usine s’est faite en un mois.

L’eau de la rivière Chaudière et d’une partie du lac Mégantic a aussi été contaminée. Très vite, des absorbants ont été dispersés et des batardeaux ont été installés pour retenir le pétrole. « Nous ferons prochainement des tests pour nous assurer le pétrole n’a pas contaminé les sédiments du lac, » dit le directeur.

Aujourd’hui, un mois après le drame, M. Mercier respire mieux. Il mentionne que l’eau souterraine, source d’alimentation en eau de la Ville n’est pas menacée à court terme, car il s’agit d’une eau souterraine sous pression artésienne, protégée par plusieurs couches d’argile imperméable. Un plan d’intervention a tout de même été mis en place afin d’assurer l’intégralité de cette protection à long terme. Des échantillonnages devront être faits régulièrement pour s’assurer de sa qualité.

Un TP dans le secteur de pétrole


Le TP Marc Chenel est aussi intervenu rapidement lors de la catastrophe. Responsable du département mécanique chez Pétrole Turmel, il a été appelé dès 2 h 30 du matin dans la nuit du 6 juillet pour fournir du diésel et de l’essence aux différents acteurs clés du drame : pompiers, policiers, unité de pompage environnementale, etc. 
« Ma fille a un commerce dans la zone rouge, j’étais plutôt inquiet. Heureusement, son appel dans la nuit pour me dire que tout allait bien m’a rassuré. »
L’entreprise familiale pour laquelle il travaille (dont le siège social se trouve à Lac-Mégantic) est très impliquée dans la communauté. Elle commandite entre autres l’équipe de hockey locale. C’est la raison pour laquelle la direction de l'entreprise n’a pas hésité à fournir, à titre gracieux, le pétrole nécessaire au fonctionnement de la génératrice de la scène du nouveau Musicafé.

Une TP compréhensive


Danielle Fecteau, TP en architecture à son compte, était chez son frère, à Saint-Gédéon, au moment du drame. Elle n’a pas été touchée directement par la catastrophe, mais son ex-conjoint oui, étant pompier volontaire. « Il a travaillé d’arrachepied à éteindre les flammes sur le site et à le sécuriser ensuite, dit-elle. Il n’a repris son emploi que deux semaines plus tard. Il a vécu une grande charge émotive. » Pendant ce temps, Mme Fecteau a pris soin de leurs deux enfants, de 3 et 6 ans, puisqu’ils sont en garde partagée.
Le choc a été difficile pour ses enfants. « Ils connaissent des enfants qui n’ont plus de parents et cela les touche beaucoup, » dit-elle.

Photo : Presse canadienne


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